J1 :
PATIENCE ET LONGUEUR DE TEMPS
De la capitale à
Syabrubensi ( 1460m) pas moins
de 10 heures
de bus et quelques imprévus. Peu après le départ,
le bus casse une main de
ressort de suspension ( c’est pas moi qui le devine …
c’est Roland, dit
« technical baje »). Le spectacle était
dans le bus, il est désormais
sous le bus. La pièce finit par être livrée sur
place, et le bus réparé. Nous
chargeons et déchargeons passagers et provisions dont deux
chèvres qui
voyageront dans la soute à outils. Une véritable page de
la vie quotidienne.
J2 :
TATOPANI, OUI MAIS VRAIMENT TATO
Syabrubensi ( 1460) / Pajung ( 1900)/ Tatopani ( 2280) / en
5hs.
Faute de temps nous ne
ferons pas étape dans le très beau
village tamang de Galtang, dont la visite reste recommandée.
Nous empruntons
sur quelques centaines de mètres la piste qui monte vers les
mines de plomb et
zinc de Somdang, puis bifurquons à gauche après le check
post pour monter
directement à Pajung ( 2h30).
Là, les locaux ne parlent souvent que leur dialecte, le
tamang. Un homme fera sa lessive aux pieds tout le temps qu’il
nous faudra pour
déguster notre premier thé de trek. Le tavernier nous
présente une grenouille
desséchée exposée sur la cheminée, et aussi
plate qu’un pancake : «
medecine ». Je réplique aussitôt que je me
porte très bien ! La
plupart des végétaux, le sang de yak, l’ail, et
surtout l’eau chaude, tout est
« medecine ». Il y a décidément
beaucoup de gens malades dans ce pays
…
De Pajung une traversée de plus en plus ascendante conduit
en 2h30 à Tatopani dans les champs d’orge. En face,
Goljung, en bas Chilime
avec son lac de barrage. A Tatopani, un bain ( «
medecine » ) dans
les eaux thermales très chaudes clôture notre
première journée de trek.

J3 :
ON Y VA /
ON Y VA PAS / ON Y VA
Tatopani ( 2280)
/ Nagthali ( 3150) en 2h45 / Thuman ( 2125) en 2h15 / Timure (
1710) en
3h)
La
montée au point de vue de Nagthali, ancien lieu de retraite
et de méditation des lamas, est régulière. De ce
très bel alpage le Paldor (
6011) et les Ganesh se dévoilent, à l’opposé
le Langtang Lirung ( 7200) qui nous
deviendra familier. Nagthali
compte 3 lodges rudimentaires où une nuit méditative sous
les étoiles serait envisageable.
Une descente abrupte dans une forêt de rhodos en fleurs
mène à Thuman (
2125) annoncé par ses champs
d’orge. La
fête à la gompa ne nous retiendra pas, j’ai trop
insisté auprès de Pasang (
« vendredi » et en plus, c’est vrai !
) pour poursuivre jusqu’à
Timure ( 1710), avant dernier village avant la frontière
chinoise. On nous
annonce 2h, il en faudra donc 3.Deux étapes en une, pardon
Tendi, on ne le
refera plus ( quoi que …).

J4 :
AU TIBET MYTHIQUE NOUS VOILA
Timure ( 1710) / Ngadi ( 1750) en 45mn/ Timure en 45mn
/ Briddhim ( 2210) en 4h.
Nous empruntons la route en
construction qui depuis deux
mois permet de relier la frontière chinoise depuis Syabrubensi,
en 15kms,
direction Kyirong ( Chine ). A la frontière, un immeuble blanc
rutilant neuf de
4 étages dérange la vue dans ce décor de
nature et de rusticité : un
mirage ? « les baraquements de la police
chinoise » expliquent
les policiers Népalais qui, eux, suent
à
grosses gouttes sous une tôle rouillée mal soutenue par
quatre piliers. Les
photos ne sont autorisées que du côté
népalais, ajoutent-ils avec humour. Je
capte leur attention avec quelques questions dans mon mauvais
népali, tandis
que Stéphanie, espion secret, photographie le côté
défendu.
La construction de cette route utilise des moyens plus
sophistiqués que celle des Annapurnas, creusée à
la petite cueillère. Le tracé
semble plus évident, l’altitude indéniablement plus
basse.
De retour à Timure, nous longeons encore la route vers aval
avant de bifurquer à gauche pour monter raide à Briddhim
( 2210) en 4h avec une
pause lunch dans un lodge accroché à flanc de coteau.
Nous logerons dans un
véritable intérieur tamang /sherpa, avec
dégustation de « churpi »
(fromage sec), momos, et thé
tibétain
obligatoire.

J5 :
"MADE IN CHINA IS NOT GOOD"
Briddhim (
2210) / Khangjung ( 2230) en 1h / Sarku (2440) / passage à 2680
/ Sherpagaon (
2510) en 3h / Lama et Ghumnachok ( 2740) en 2h30
Un
très long sentier balcon traverse plusieurs hameaux
tamangs. Depuis Sarku où un groupe d’artisans Indiens
travaille à la
construction d’un grand lodge, il n’y a plus aucun village
jusqu’à Sherpagaon,
mais une splendide montée dans une forêt de rhodos en
fleurs, de fougères,
d’orchidées parasites et de singes ( entelles à
longue queue). Depuis le point
haut ( 2680) , un très étroit sentier toujours balcon, et
enfin la descente sur
Sherpagaon. Après avoir persuadé Tendi, nous tentons
notre chance pour
Ghumnachock ( 2h30), évitant soigneusement de loger à
Lama, le
« Thamel » du Langtang. Le River Side est le seul
lodge du lieu dit.
Il est plein comme un oeuf, la nuit tombe, Tendi pas encore là.
Le miracle se
produit : un groupe de trekkeurs décide, malgré
l’heure avancée, de
poursuivre ( je comprendrai le lendemain pour quoi …) et
libère le dortoir. Il
est 18h30, la Langtang khola monte en décibles, Tendi finit par
arriver. Nous
nous installons avec les choux, le riz, le
PQ, et notre équipe dans le dortoir.
« Made in China is not
good » : Tendi a les pieds tout verts, ses chaussettes
ont déteint.
Ce sera son mot de la fin pour cette belle et longue étape.

J6 :
LE NEPAL APPARTIENT A CEUX QUI SE LEVENT TARD
Ghumnachock ( 2740) / Ghoratabela ( 3000) en 45mn/ Langtang
( 3330) en 2h

On
est passé du
« Demain départ 7h » à
« Demain tu veux partir à 9h, c’est ça,
Didi ? ». Oui, c’est ça.
L’équipe y prendrait même goût.Du River Lodge
en moins de10mn nous voilà dans un lieu
idyllique au Woodland Lodge, encore aurait il fallu le savoir la veille
... Une
maison de poupées dans une clairière, des rhodos fleuris,
des iris nains, la
Langtang khola plus sage le matin.Nous prenons le thé à
Ghoratabéla ( 3000) avant de
poursuivre sur Langtang ( 3330) . Les étapes sont volontairement
plus courtes
en altitude. Premières vues sur le Tsergo Ri ( 5000) dont nous réussirons l’ascension,
et le
Gangchenpo ( 6387).
Langtang compte 65 foyers, une salle des fêtes, une
coopérative fromagère qui
gère aussi
l’électricité. Les familles payent 0,30
euro/mens/ampoule ! Seule la
fromagerie dispose d’un compteur, car ses fours
électriques consomment beaucoup
d’énergie. Au Népal, la quasi totalité de
l’énergie est hydroélectrique.
Il grêle : le tsunami du 11 mars aurait, aux dires de
certains Népalais, perturbé les flux
météos.

J7 :
LAISSER DIRE
Langtang ( 3330) / Kyangjin ( 3750) en 2h30. ( présence
d’un
satellitaire ).
Nous avons droit
à la séance quotidienne de
dissuasion : « Impossible d’aller au camp de
base du Langtang
Lirung, il y a des avalanches, des morts, c’est dangereux, je
connais, je suis
de là bas ». Je ris au nez du lodge man, rassure
Pasang notre guide ( …)
ainsi que le groupe, et nous voilà partis. Ce sera notre
journée la plus sauvage,
et une des plus belles.
Tendi trouve un cheval pour porter les bagages à sa place.
Je reconnais cette arrivée sur le fond de vallée, les
manis, les drapeaux
propres du Losar, la fromagerie et enfin le village. Penzom, elle, me
reconnaît ! Nous nous installerons juste à
côté, au souhait de notre
équipe. Penzom se souvient qu’il y a 4 ans, avec Paulo,
nous avions logé
plusieurs nuits chez elle, et étions ensuite partis en autonomie
pour le
Tillman Pass malgré les forts avis contraires du village. Elle
tient seule le
lodge en l’absence de son mari ( dont je raconte l’histoire
dans mon livre sous
le nom de Tashi), et de ses deux enfants. Elle
ne sait ni lire ni écrire et le déplore.
Elle a besoin de chaussures et je promets de m’en souvenir lors
d’un prochain passage. ( avis :
du 38 !).
Après une assiette de pâtes, nous montons au kharka de
Chalepoch ( 4180) rive gauche de l’impressionnant glacier du
Langtang Lirung (
7200), faute pour moi d’avoir reconnu le sentier qui monte rive
droite au CDB
de ce même sommet. C’est une montagne technique,
ambitieuse, impressionnante.
Le site est sauvage, le glacier à portée de mains, les
chevaux du vent flottent
sur la moraine, les portes des kharkas sont fermées par des
accumulations de
pierres, la vue s’étend du Nayakang ( 5844) au Gangchenpo(
6837) en passant par
le Ganga la ( 5300) : ambiance.

J8 :
NOTRE 5000
Kyangjin ( 3750)
/ Tsergo Ri ( 5000) en 3h30 / Kyangjin en 2h30 / Mundu ( 3410) en 1h20.
4920
sur l’alti de Roland, 4984 sur ma carte, 5087 sur une
autre, bref, pour nous peu importe, ce sera
« notre » 5000 du séjour,
la montée vaut bien cette altitude ! La
cerise sur le gâteau de ce trek nouvelle
mouture.
Au retour, je laisse ma polaire à Penzom, puis malgré la
pluie, la première pluie de journée du séjour,
nous décidons de perdre de
l’altitude pour mieux dormir. Au grand dam de
l’équipe nous ferons halte avant
Langtang à Mundu ( 3410).
« Typical » se moque Pasang, qui dans la cour
essaye de se souvenir
comment monter un cheval. Original et surtout bienvenu vu la
météo.

J9 : LE VILLAGE EN VIRGULE
Mundu ( 3410) / Rimchi ( 2440) en 4h de descente / Bamboo (
1960) en 1h de descente / Thulo Syabru ( 2250) en 2h30 de
montée.
Nous dévalons la
quasi-totalité de l’impressionnante vallée
du Langtang en une seule journée , et qui plus est nous nous
offrons le luxe de
remonter sur l’autre versant ! Tendi arbore
le même sourire charmeur : serait-il
toujours content de
nous avoir connus ? 8h de marche aujourd’hui. Hier, il a
décollé de sa
chaise quand Pasang lui a annoncé l’étape.
Aujourd’hui, on change de pays et on change de saison. On
passe de 5000 à 1960 mètres au-dessus du niveau de la
mer. En trois jours la
végétation a fait de son mieux dans le vert. La nature a
ajouté cigales,
papillons et essaims sauvages, intarissables auprès des eaux
turquoises du
torrent.
Après Pahiro ( littéralement « glissement de
terrain »), une plage au bord de la Langtang khola invite
à la pause. Nous
acceptons volontiers l’invitation.
Un
tuyau amène de l’eau chaude soufrée, une chance
pour ces messieurs qui d’emblée
se déshabillent et se douchent plus chaud que jamais ( la
seconde douche du
séjour, précise « baje »).

J10 :
CONCERT POP A DHUNCHE, ou le Gosaïkund – Langtang
– Rasuwa festival 2011.
Thulo Syabru ( 2250) / Thulo Barkhu ( 1860) en 3h / Dhunche
( 1960) en 2h
Le petit –dèj
tardif sur la terrasse du Peace Hotel aurait
presque des allures de vacances
balnéaires sans les croissants et sans la plage. A
l’Evening View Lodge la
patronne me reconnaît et nous interpelle pour un thé. Pema
Dorje, son mari, est
très impliqué dans la vie locale. Il explique que le
gouvernement népalais
envoie pour le village sept instituteurs n’enseignant que le
népali. Lui
recherche activement des volontaires internationaux pour
l’enseignement de l’informatique
et de l’anglais. Internet est en effet monté
jusqu’à Thulo Syabru. Nous
constatons ensemble que le trek au Népal n’est plus ce
qu’il était : Pema
Dorje déplore le peu de touristes cette saison :
« Where is the
money ? ».
Un très agréable sentier balcon dans les arbres conduit
en
3 heures et sans effort à Thulo Bharku, qui est désormais
au bord de la route.
Puis au prix de 2 heures de poussière, nous clôturons
notre trek, crépis, à
Dhunche ( 1960) où se tient un grand rassemblement populaire,
forcément en
notre honneur !! : vedettes pop, chansons à l’eau de
rose comme on les aime, folklore, surprise
et anachronisme.
J11 :
LE BUS EST UNE
BOITE DE NUIT
Le jus de nos chaussettes est plus
foncé que le
café du
matin : il est grand temps de rejoindre la capitale. Le bus est
une boîte
de nuit : le contact démarre l’autoradio. Nous
voilà secoués comme dans un
crêp’shaker, inondés de musique pop népalaise
( la même qu’hier soir ). A
chaque nid de poule, on reçoit le voisin sur les genoux. Les
Népalaises sont
belles, de rouge et de doré vêtues, maquillées
élégamment, impassibles dans ce
bain de poussière, et debouts souriantes dans
l’allée centrale les 3 heures
qu’il faudra pour relier Dhunche à Trisuli où elles
descendent. Pause dal bhat toujours
aussi rapide, et on repart sur le même rythme pour 4 heures
encore. Il faut
être endurant.
Installation à la maison chez Mingma, la douche, le
shampoing, le yaourt, les mangues.

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